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MADININA BUNDU DIA KONGO(ZIKUA DIA MADININA BDK DANS LES AMERIQUES)
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MADININA BUNDU DIA KONGO(ZIKUA DIA MADININA BDK DANS LES AMERIQUES)
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MADININA BUNDU DIA KONGO(ZIKUA DIA MADININA BDK DANS LES AMERIQUES)
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5 octobre 2020

HÉRITAGE KONGO DU REGGAE EN JAMAÏQUE

Héritage Kongo du Reggae en Jamaïque !

La tradition du Kumina et du Nyabinghi dans la formation du mouvement rastafari et du reggae

Il existe plusieurs approches de définition du mot Kumina. On dit, qu’il vient du mot kikongo Kumu, qui veut dire mélodie où encore jouer un instrument musical. Kumina vient pour certains du verbe Kikongo Kamana. Chez Karl Laman Kamana veut dire « se sentir en Obligation d’agir pour». Selon Fukiau Bunseki Lumanisa cité par Diane M. Stewart du Département des études des Religions de l’Emory University à Atlanta en Géorgie (États-Unis d’Amériques) « Kumina est à la fois une religion et une musique pratiquée par les habitants de l’Est de la Jamaïque, à Saint Thomas et dans la zone de sainte Catherine, Portland, Saint mary et la capital Kingston, des zones où on a conservé les survivances de la langue Kikongo de l’Afrique centrale et que Kumina viendrait du mot kikongo « Sakumuna » qui veut dire bénir ».

Par contre, la définition la plus vraisemblable est celle que j’ai récoltée lors des enquêtes de terrain auprès des populations Kongo de Brazzaville et du district de Boko en République du Congo. Plusieurs anciens Kongo m’ont dit que le culte du Kumina a existé au Royaume kongo ; il se pratique toujours de nos jours. Il consiste à faire avaler mystiquement une personne à travers un rituel afin de le protéger contre des sorciers ou des calamités naturelles. C’est un mot qui vient donc du verbe « mina » qui veut dire avaler et Kumina serait l’action d’avaler. Cette définition est également partagée par le linguiste congolais François Lumwamu. Cette conception est parallèle aux pratiquants du kumina de la Jamaïque qui cherchaient sans cesse à se protéger de la foudre des maitres d’esclaves. Cette approche vraisemblable est superposable à l’importance que les Kongo accordent aux ancêtres dans leur vécu quotidien et dans leurs croyances spirituelles. Le Père Van Wing qui a étudié la sociologie, la magie et la religion des Kongo explique que les Ancêtres « Bakulu » au pluriel ou « Nkulu » au singulier sont les garants de tous les désirs terrestres du Mukongo à savoir la fécondité, la santé pour lui-même et les siens mais aussi, la longévité, la prospérité dans ses propres entreprises.

« Quand les Bakongo sont l’objet d’une injustice, ils demandent à un ‘ nkulu ‘ de rendre justice sur l’auteur du domage.Ce sont les ancêtres qui donnent la force et la santé au malade. Pour ce, plusieurs rituels sont souvent effectués aux cimetières en apportant de la nourriture et du vin de palme afin de s’adresser aux ‘ Bakulu ‘ ». 

Le terme « Sakumuna » pourrait avoir son sens dans le cadre de la bénédiction que l’on reçoit des ancêtres après avoir été avalés et protégés (kumina) par ces derniers. Anand Prahlad, spécialiste des cultures africaines de la diaspora africaine des Amériques, à l’université du Missouri, pense que : « Le Kuminaa été introduit en Jamaïque par les descendants des esclaves du Royaume Kongo entre 1840 et 1865 ». L’historienne Monika Schuler, Professeur Émérite d’histoire au département d’histoire de la Wayne State University aux États-Unis d’Amérique, a fait des recherches sur l’émigration des Africains vers la Jamaïque ; elle affirme que 8,000 esclaves africains capturés lors des campagnes d’abolition de la traite en provenance de l’Afrique Centrale furent expédiés en Jamaïque à partir de l’ile de Saint Helena et la Sierra Léone entre 1841 et 1865. D’autres furent expédiés directement en Casamance (Sénégal), au Liberia, aux Bahamas et en Guyane Anglaise. Il y a beaucoup de survivances du Kikongo dans ces différents pays. D’autres furent recrutés dans l’armée Britannique.

Kenneth Bilby de l’institut Smithsonian de Washington (Etats Unis d’Amérique) a établi que le Kumina est une tradition et une religion des Bakongo, introduite à l’est de la Jamaïque après l’abolition de l’esclavage entre 1840 et 1860. Les premières recherches académiques sur le Kumina ont été initiées par l’anthropologue Américaine Zora Neale Hurston en 1930 et ensuite par l’ethnologue britannique Madeline Kerr. Mais l’étude la plus avancée est celle de Kenneth Bilby et Fukiau Bunseki Lumanisa qui ont récolté des témoignages oraux, chants et ont établi un glossaire linguistique et ont conclus que le Kumina est un système de pratiques rituels, un culte ancestral pour répondre à une oppression sociale.

Le kumina est une expression des idéaux religieux, Pour Diane. M. Stewart c’est « un ensemble de rituels qui gouverne la vie des adhérents» c’est un rituel à travers lequel les ancêtres Africains sont célébrés et apaisés on combine la danse, les chants et les drums avec des mouvements et des cadences spécifiques. Le tam tam est appelé « NGoma », il est central dans le Kumina. Le Kumina consiste aussi à guérir avec des herbes. « Il ya une conscience très forte de l’identité ethnique Kongo, au sein des pratiquants du Kumina ». Dans l’est de la Jamaïque, il est coutume d’entendre des gens clamer leurs origines chez les « Munchunde »(Musundi). Les ancêtres sont appelés « Kongo », « Nkuyu » les défunts « Bavumbi ». Le rituel est influencé par le Kikongo. Les ancêtres sont les messagers de nzambi, ils ont le pouvoir et ils assistent les vivants.

Les pratiquants du Kumina sont en communication constante avec les ancêtres à travers des rituels de possession et autres actes de dévotion. La possession est appelé « Myala ». Les chants du Kumina sont classés en deux types « Les Bailo » et les « Country ». Les Bailo sont en créole Jamaïcain et sont les moins sacrés, tandis que les country sont des chants en Kikongo et sont utilisés pour être en communication avec les esprits durant le « Myala ». L’interaction entre le monde visible et invisible, est celui du monde des vivants et celui des ancêtres est capital, à travers la vénération de Zambi ou King Zambi. La nourriture est appeler « Madya » et quand vous êtes prêt à chanter et danser on dit « Mambugumasetta ». On travaille avec les Inquices (Enkises), « les Nkisis ».

Dans la culture du Kumina, il y a une mémoire collective, d’indignation sur la capture, l’exil, l’esclavage et l’oppression par les Blancs, la tradition orale du Kumina suggère que la suprématie des blancs envers les Africains est la cause des souffrances des Noirs. Les pratiquants du Kumina ont un esprit panafricaniste à travers leur unité. C’est une pratique réellement exprimée et ressentie au sein de la population afro-jamaïcaine. Le kumina est la plus africaine des expressions culturelles de l’ile de la Jamaïque. C’est un héritage incontestable des Kongo, une population qui a également contribué à la formation du créole afro-jamaïcain avec 19% des mots. On peut reconnaitre plusieurs termes kikongo dans ce créole tel que : Dundus (albinos), Poto-poto (la boue), Pinda (arachides). Olive Levin a rapporté une vingtaine de survivances de la langue kikongo dans le créole jamaïcain parmi lesquels : kandal, kento, malavu, mungwa, kuunga, etc. Pour Anand Pralahd « le Kumina a influencé la tradition rastafari depuis son premier leader ». Leonard Percival Howell était d’abord un pratiquant du kumina. Il est devenu par la un prophète du rastafarisme ; il y avait introduit les danses du kumina dans les cérémonies. Le Pinnacle était sous l’ambiance de la musique du kumina, car la majorité des adeptes de Howell était de St Thomas peuplé essentiellement des Kongo. Cette musique kumina se jouait avec deux tam tams à savoir : « le Baandu » et le « Funde ». Les chansons notoires furent : « King Nzambi », « Malembe mbem » et « Nki Balongo ».

Monika Schuler, dans la même optique déclare : « les Bakongo ont constitués le nucléon du mouvement Rastafari qui a émergé vers 1930 à l’est de la Jamaïque, HailéSélassié était appelé King Zambi (du Kikongo Nzambi), Dieu, la plus haute autorité spirituelle ». En Jamaïque « Natty Congo » est un terme désignant un rasta qui porte des dreadlocks. Selon Ras Dennis Jabari « Bongo Natty » est aussi un terme qui sert à décrire un rasta man avec des locks. « Bongo » est un mot qui vient du kikongo « Mbongo ». Dans le dictionnaire kikongo et kituba français de Pierre Swartenbroeck, « Mbongo » désigne la prospérité, la famille, la richesse humaine ; c’est un adjectif qui qualifie la richesse, mais aussi l’argent. « Kongo bongo » veut tout simplement dire « la famille ou la nation kongo ». On peut aisément comprendre la prépondérance de cette nation dans la formation du rastafarisme et de son véhicule qu’est le reggae.

Dans l’album « Natty Dread » (1974), de Bob Marley désigne un adepte du rastafarisme. À travers cette chanson Bob Marley chante « Dreadlocks Congo Bongo ». Il fait l’éloge de la beauté des locks et des cheveux naturels « Dreadlocks Congo Bongo… a Dreadlocks Congo Bongo ». « Dreadlocks Congo Bongo » sera littéralement traduit comme étant « la coiffure de la nation kongo de la Jamaïque ». Cela est tout à fait vraisemblable car c’est au Pinnacle que cette coiffure fut adoptée par des pratiquants du Kumina.

On a souvent pensé que c’est une imitation des papillotes juives ou de la crinière du lion de Juda. Mais pourtant Bob Marley chantait que les locks étaient une coiffure de la nation kongo de Jamaïque « les premiers rasta ». C’est l’historienne, philosophe et artiste musicienne camerounaise, Fongot Kini-Yen Kinni, vice-chancelière en charge de la recherche de l’Université de Bamenda (Cameroun), qui a su lever l’équivoque en rapportant que les rasta avait épouser l’idéologie et la théologie de l’église chrétienne africaine de libération de Kimpa Vita. « Kimpa Vita et les antoniens avait des dreadlocks, voilà pourquoi Bob Marley appelait les rasta des « Natty Dread »…..Bob Marley était de la nation Congo Bongo et un antonien confirmé, Bob Marley était fier d’affirmer les racines Bakongo du rastafarisme ainsi que les origines Bakongo des dreadlocks ».

Tous ce qui précède s’exprime clairement dans la chanson précitée (Natty Dread) de Marley : « A dreadlocks Congo Bongo I……Eh children get your culture…and don’t stay there and gesture, a-ah ». « Je suis un rasta de la nation kongo…..eh enfants saisissez votre culture, ne soyez pas distraits, a-ah ». Dans ‘black man redemption’, Marley redit la même chose « woy-a, Natty Congo: A dreadlocks Congo I…..woy-a, Natty Congo….. »

Un témoignage récolté auprès du Pr Scholastique Diazinga, historienne congolaise, au cours d’une rencontre à Brazzaville, m’a confié avoir reçu Rita Marley, la veuve de Bob Marley dans les années 1981-1983, avec les restes des locks de Bob Marley. Elles se sont rendues sur les bords du Congo pour jeter ces locks dans le fleuve. Ce geste peut-il traduire les vœux du défunt pour qu’une partie de son corps se retrouve sur la terre de ses ancêtres ? Lui qui avait des origines blanches et nègres. Plusieurs personnes habitant Brazzaville m’ont également témoigné avoir suivi à la télévision congolaise la présence de Rita Marley à Brazzaville à cette époque.

L’utilisation de la Marijuana appelée par certains rasta dont Bob Marley avec le terme kikongo « Kaya » (l’herbe) ou tantôt « Kongo Tobacco » et même Diamba a été introduit chez les rasta par les pratiquants du Kumina. Cela est de toute façon une certitude plus que la culture de la marijuana au sein de la communauté rasta débuta au Pinnacle. Le lien entre l’utilisation de la marijuana et la tradition kongo dont est issu le kumina est solidement établi par le fait que les Tétéla, les Sakata et les Kongo recouraient au cannabis pour invoquer les ancêtres. « Les rasta utilisent le chanvre pour favoriser la transe et entrer en contact avec les esprits ». Chez les Kongo, les « kilongo » désignaient la plante sous le nom de « Kaya » que l’on retrouve chez les rastas. Dans la secte Bundu dia Kongo et d’autres dites Ngunza appeler aussi « Mananga Ma Kongo », le chanvre est utilisé pour chasser les mauvais esprits et aussi apercevoir le monde invisible. Les Luba voisins des Kongo, ont renoncés à leurs différentes idoles et fétiches en érigeant le cannabis en authentique déité. Des Lubas se définissaient comme les « Bene riamba » (les fils du chanvre).

L’Afrique centrale notamment, la région de l’ancien Kongo est un cordon ombilical entre la Jamaïque et l’Afrique. Le terme « Congo » en Jamaïque n’est qu’une créolisation de « Kongo ». Ce terme a été repris par plusieurs artistes du reggae comme le prouve le titre  « Roots, Natty roots, Natty Congo » de Johnny Clarke, « Dread Natty Congo » de Sister Carol, le groupe The Congos avec leur Album « Heart of the Congos » et la chanson « Congoman » sans oublié les célèbres musiciens du reggae tel Natty Congo, Daweh Congo et Cédric Congo Myton, l’une des voix les plus mystiques et spirituelles de la musique jamaïcaine. Lekumina a donné naissance au pukkumania, encore appelé mpokominya provenant du mot kikongo « mumpoko », le nom d’une plante du kongo qui a engendré une religion afro-jamaïcaine caractérisée par des rituels de guérison et aussi le pilier du grand réveil syncrétique en Jamaïque à partir de 1860.

Mais plus tard le kumina sera remplacé par une nouvelle fusion musicale appelée « Nyabinghi », elle-même en partie basée sur les rythmes du Kumina. À ce sujet, le musicologue et anthropologue Kenneth Bilby dit : « La musique kumina est indissociable de ce que plutard les rastas vont appeler Nyabinghi. » Anand Prahlad pense également que « le kumina a influencé la naissance du Nyabinghi  ». Le Nyabinghi est joué par des groupes de percussions et employé par les rastafari, principalement pour accompagner leurs chants traditionnels liturgiques. Le Nyabinghi fut au départ une société secrète dite « Youth black faith » qui deviendra l’ordre Nyabinghi, empruntant le mot à une organisation constituée en 1935 durant l’invasion italienne de l’Ethiopie, quelques années après l’apparition du mouvement rasta en Jamaïque, en tant que groupement secret pour détruire les blancs. Le « Youth Black Faith » avait 75 à 100 anciens dits « elders » ou patriarches qui furent responsables des rituels de ce cercle fermé pour la conduite spirituelle du destin des Noirs de la Jamaïque.

Le fondateur connu de cette secte est appelé « Congo Watu » dit Ras Boanerges avec le titre de « The most Ancient Elder ». Cette secte était constituée de plusieurs partisans de Leonard Howell. Les titres tels que « Bongo » ou « Congo » de certains Elders (Anciens), tissent les liens de la composante ethnique de cette secte liée au Kumina des Bakongo de la Jamaïque.

Parmi les noms des dirigeants (anciens) du Nyabinghi figurent : Congo Rock I, Bongo Time(…). Congo et Bongo sont des titres dans la religion rastafari et sa secte Nyabinghi : « Ras Congo », « Maa Congo »(…). Congo et Bongo sont des désignations honorifiques d’être africain en Jamaïque. La volonté du Nyabinghi est de faire sortir les gens de l’obscurité et de les guider vers la lumière. Le terme Nyabinghi désigne une énergie qui permet de détruire la race blanche, c’est une secte anticolonialiste pour empêcher les forces impérialistes Britanniques de forcer les noirs à travailler et de lever des taxes injustifiées. Utilisant la musique comme une dimension rituelle afin de dégager la force vitale ou force de la vie dite « nyama » un mot utiliser dans plusieurs langues bantoues.

Les origines du Nyabinghi sont mythologiques comme l’histoire de la naissance de Rome. Nathaniel Samuel Murrell qui est un historien des religions dit que le Nyabinghi est une secte, une célébration rituel, un style de musique, une idéologie qui exprime un esprit de résistance à l’oppression, associée à une révolte contre les colons européens au sud-ouest de l’Ouganda, dans la région de Ndorwakajara à la fin des années 1800. Nyabinghi selon Murrell veut dire mort aux oppresseurs. Parmi les insurgés figurait une femme medium « Muhumusa » qui possédait l’esprit d’une reine légendaire Nyabinghi et ceci devint un motto.

Le journaliste italien Federico Philos du Jamaïca Times écrivit un article sur l’ordre « Nyabinghi » en 1935 qui stipulait que les nations africaines auraient créé une société secrète appelée « l’ordre Nyabinghi ». Cette société fut fondée par le roi du Kongo pour résister contre la colonisation et Philos ajoutât qu’un congrès ayant eu lieu à Moscou en 1930 avait octroyé les pouvoirs suprêmes à Hailé Sélassié pour être le chef de l’ordre Nyabinghi.

Cet article avait circulé au sein des rasta de Kingston quand Mussolini avait envahi l’Ethiopie en 1935 et en 1949, il y eu une convention rasta à Wareka Hills, sous une bannière Nyabinghi et quelques temps après, les militants du Youth Black Faith de Congo Watu se sont réappropriés le concept Nyabinghi comme un cri de bataille contre la persécution et plus tard un ordre naquit avec le nom Nyabinghi.

À la manière d’Hérodote qui a soustrait les éléments épiques et fabuleux des récits des logographes afin de construire une vraie histoire cohérente et vraisemblable, et vu que l’historien est l’homme des sources pour distinguer l’authentique du douteux et de plus la construction des scénarios vraisemblables est une exigence pour reconstruire la vérité. Il faut d’abord remarquer que le journaliste Federico Philos n’est pas un historien mais plutôt un homme des medias qui rapporte sans critiques une information.

Le récit que rapporte Murrell a deux incohérences. En effet, celui-ci présente le Nyabinghi comme une secte des révolutionnaires ougandais et ensuite comme un ordre fondé par le roi du Kongo en 1930. Hors la conférence de Berlin de 1885, avait déjà mis fin à l’existence du Royaume kongo, qui a été divisé en trois régions distinctes. Le Nyabinghi ne peut pas être considéré comme une survivance religieuse des Afro jamaïcains puis qu’il n’y aucune de trace d’esclaves originaire d’Ouganda ou du Rwanda ou les origines du Nyabinghi sont souvent situés. Mais la région du Congo est citée dans ce récit de Murrell comme une zone ou cette secte a également existé et les populations Kongo sont bel et bien présentes en Jamaïque. Le fondateur de l’ordre à Kingston s’appelle Watu Congo (ras Boanerges). Le terme Nyabinghi est donc comme le personnage d’Hailé Sélassié en Jamaïque, c'est une récupération d’un fait par une population dont la situation se reconnait identique aux faits récupérés.

Certains rastas se proclamaient des « Nyamen ». Ce terme fait allusion à des hommes féroces et rebelles avec une énergie « Nyama » (animal) pour détruire les colons britanniques. Un parallèle peut être fait avec la résistance de la prophétesse Kimpa Vita qui a lancé des cris à mort à l’oppresseur blanc avec un syncrétisme similaire à celui du Nyabinghi, De même, la proclamation des saints noirs et d’un moïse noir dans le Nyabinghi a également existé au sein du Mouvement antonien de la prophétesse kongo Kimpa Vita.

Enfin une autre tradition populaire des afro-jamaïcains stipulent qu’Iyah Congo est l’ordre ancien qui a précédé le Nyabinghi. Logiquement Iyah Congo a précédé le Black Youth Faith qui créera l’ordre Nyabinghi à Kingston. Taxés de sorcellerie, les anciens du Nyabinghi furent l’objet de la plus sauvage répression colonial. Selon Elder Binghi répondant à une interview d’un journaliste du City Sun (Washington, DC) en juin 1988, « Nyabinghi est la seule musique indigène du rastafari ; c’est le seul ordre divin du mouvement rastafari ».

La musique à une dimension rituelle dans le Nyabinghi, elle dégage la force vitale comparable à la force d’un animal « Nyama » abondante « binghi ». Les tambours Nyabinghi sont joués nuits et jours lors des cérémonies qui peuvent durer de quelques heures à parfois plusieurs jours. Dans le rastafari les instruments de percussion Nyabinghi accompagnent les chants. La musique du Nyabinghi est une musique profondément organique. Elle suit la pulsation cardiaque comme son originel primordial qui perpétue l’enracinement ombilical avec la Terre-Mère. Les tambours communiquent l’univers intérieur, la force spirituelle. Le « Heartbeat » ou battement du cœur fait la musique du Nyabinghi. En jouant le battement du cœur, on récite simultanément des chants religieux. Les battements du cœur se jouent avec des tambours burrus originaires de Clarendon chez les Marroons et c’est à la fin des années 1930 que les burrus ont fusionné avec les rastas. Les burru sont généralement attachés aux traditions ashantis du Ghana et baoulé de Côte d’ivoire.

La musique du Nyabinghi est une musique profondément organique, qui suit la pulsation cardiaque comme son originel primordial ; elle perpétue l’enracinement ombilical avec la terre-mère. Le « bass drum » est la fondation qui soutient l’ensemble. Le fundeh, celui qui fait « bop bop », reproduit les battements du cœur d’un homme. Le repeater enfin agit comme le sang qui part du cœur pour se diffuser dans les différentes veines et organes vitaux, dans tout le corps. Jouer les percussions c’est jouer avec les battements de son cœur. Bob Marley disait « écoute le One drop et tu auras le temps de bouger ». Le One Drop est le battement du cœur du reggae. Outre la secte Nyabinghi, il existe plusieurs autres groupes sectaires parmi lesquelles : Covenant Rastafari, Messianic Dread, Sellassian Church, Bobo Ashanti ou Bobo Dread dit mouvement Emmanuelite qui sera créée après la Convention Rasta de 1958 par Prince Emmanuel, la secte des douze tributs d’Israël, liée à l’astrologie avec une orientation chrétienne. Elle a été fondée en 1968 par Vernon Carrington, alias prophète Gad. Les douze tributs d’Israël est la plus grande de toutes les congrégations rastafari.

Notes : Extrait "Pour une histoire du reggae : le véhicule du rastafarisme" de Arsène Francoeur Nganga (Chercheur en Histoire et Anthropologie socio-culturelle des Amériques noire).


Mis en ligne par Ntumua Mase

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